Les ulcères gastriques sont une affection douloureuse et malheureusement courante chez les chevaux, affectant potentiellement leur bien-être général et leurs performances. Le Syndrome de l’Ulcère Gastrique Équin (EGUS) est un terme scientifique décrivant le développement de plaies sur la paroi de l’estomac du cheval, résultant de la détérioration de la barrière physico-chimique protectrice et de l'action des acides digestifs. Cette condition peut également s'accompagner d'ulcères du gros intestin, entravant l'absorption des nutriments et provoquant une multitude de problèmes de santé et de comportement. On estime que l’EGUS affecte 60 à 90 % des chevaux sportifs. Les situations sont exacerbées lors du transport, d'exercices intensifs et de longues périodes sans fourrage, mais il est également présent chez les chevaux de loisir et les poulains.
Anatomie et prédisposition naturelle
L'estomac du cheval est divisé en deux parties principales : la région squameuse (supérieure) et la région glandulaire (inférieure). La région glandulaire est celle qui produit l'acide gastrique, mais elle est également protégée par la production de bicarbonate et de mucus. En revanche, la région squameuse ne possède pas ces défenses naturelles, ce qui la rend particulièrement vulnérable ; 80 % des ulcères gastriques se trouvent dans cette zone.
Les chevaux sont naturellement prédisposés aux ulcères car leur estomac produit de l'acide constamment, ce qui les expose à un risque élevé, surtout lorsque l'estomac est vide et que les aliments ne peuvent plus faire tampon pour cet acide. Dans leur environnement naturel, les chevaux broutent jusqu'à 16 heures par jour, ce qui assure une présence continue d'aliments riches en fibres, protégeant ainsi leur estomac.
Signes cliniques des ulcères gastriques
Le diagnostic définitif des ulcères gastriques repose sur une gastroscopie, un examen vétérinaire qui permet d'inspecter visuellement l'estomac et l'intestin proximal du cheval afin de déterminer la présence, la gravité et l'emplacement des ulcères. Cependant, les signes cliniques sont souvent non spécifiques et variables d'un cheval à l'autre. Les propriétaires peuvent remarquer que leur cheval ne "va pas bien". Parmi les signes courants à surveiller, on trouve :
• Un manque d’appétit ou un appétit capricieux
• Une mauvaise condition physique ou une perte de poids
• Une diarrhée chronique
• Un pelage terne
• Le bruxisme (grincement de dents)
• Un tempérament plus agressif ou nerveux
• L'augmentation des comportements stéréotypés, comme le « tic du rot » (aérophagie)
• Des coliques aiguës ou récurrentes
• Des performances médiocres à l’effort
• Une sensibilité dans la région de la sangle
• Le fait de se coucher souvent
• Des étirements pour uriner
Causes multifactorielles des ulcères gastriques
Plusieurs facteurs contribuent aux taux élevés d'ulcération gastrique chez les chevaux :
1. Gestion de l'alimentation La fréquence et le mode d'alimentation sont des facteurs de risque majeurs. Les chevaux vivant en boxe avec un accès limité au pâturage peuvent passer de longues périodes sans manger, laissant leur estomac vide et exposé à l'irritation acide constante.
2. Consommation élevée de céréales Les céréales, d’une appropriation plus rapide que le foin, entraînent une production de salive moindre (environ la moitié par rapport au foin pour une quantité équivalente). De plus, elles quittent l'estomac plus rapidement, prolongeant les périodes d'estomac vide. Une consommation élevée d'amidon ou de céréales peut également provoquer une production locale d'acides gras volatils dans l'estomac, abaissant davantage le pH et augmentant le risque d'ulcères.
3. Exercice intensif L'exercice, en particulier l'entraînement intensif et la compétition, est un facteur de risque majeur. Environ 95 % des chevaux d'endurance et de course souffrent d'ulcères gastriques, un chiffre qui monte à 100 % pour les chevaux de course actifs. L'augmentation de la pression abdominale pendant l'effort comprime l'estomac, poussant le contenu acide vers les zones sensibles. De plus, la réduction du flux sanguin vers l'estomac pendant l'exercice entrave la guérison des ulcères préexistants. Les longues périodes sans accès à la nourriture et le stress lié au transport et à l'environnement contribuent également à ce risque élevé. Même un entraînement typique ou des compétitions amateurs peuvent provoquer des ulcères en cinq à sept jours.
4. Accès intermittent à l'eau Les périodes sans accès à l'eau, notamment pendant le transport ou si l'eau est gelée en hiver, augmentent les chances de développer des ulcères gastriques. L'administration orale répétée de solutions d'électrolytes hypertoniques a également été associée à une augmentation du nombre et de la gravité des ulcères.
5. Stress physique De légers changements dans la routine et l'environnement d'un cheval peuvent induire un stress, augmentant le risque d'ulcères. Une élévation de l'hormone de stress, le cortisol, entraîne une baisse de la production de prostaglandine, ce qui diminue le pH de l'estomac et affaiblit sa barrière protectrice, pouvant mener à l'érosion de la paroi et à la formation d'ulcères. Les événements stressants comme le transport, les changements d'environnement, les maladies et le confinement au box (même avec du foin à volonté) prédisposent les chevaux à des niveaux de cortisol plus élevés et un risque accru d'ulcères.
6. Environnement social Les chevaux sont des créatures sociales, et leur environnement social peut fortement influencer leur niveau de stress et, par conséquent, leur risque d'ulcères. Un changement dans le troupeau (introduction ou départ d'un cheval) ou le fait de garder un cheval seul augmente le risque d'ulcération gastrique.
7. Anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) souvent utilisés pour traiter les boiteries ou d'autres affections, sont un facteur de risque. Il est crucial de discuter avec le vétérinaire des moyens de réduire le risque d'ulcères lors de ce type de traitement.